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jeudi 4 novembre 2010

Mon art

A trente ans sonnera le glas.
Il est tard dans mon lit, quand je songe à demain.
Une soudaine envie du cassoulet en boite qui traîne dans le meuble depuis X temps.
Non, juste de la saucisse en réalité.
Ou plutôt le quart de saucisse que pourrait bien contenir cette boite.
Petite.
La boite.
Mais suffisante.
Oui mais non, je ne me taperais pas un cassoulet à cette heure de la nuit.
Tant pis alors, je continue d’écrire dans ma tête. Encore un peu.

Deux ans que j’ai peur de mal vieillir, et que je refuse d’être heureuse en ce jour con a souhait, que je refuse de recevoir ces messages débiles, que je ne réponds pas au téléphone et que toute la journée je fais semblant d’emmerder la terre entière.
Je fais semblant oui.
Parce-qu’en réalité il y a quand même cette partie de moi, celle là, toute petite, et tout au fond , qui est heureuse de faire l’objet de « tant » d’attention.
Cette petite partie de moi qui à l’impression d’être quelqu’un, d’être aimée et d’exister.

Comme cette partie de moi, aussi, qui est heureuse quand on me relance gentiment.
« Alors Lola, a quand le prochain texte !? »
Le problème c’est que l’autre partie de moi, la plus visible, la carapace, se chie dessus devant une page blanche.
Comme si je ne savais plus écrire.
Et là, cette partie de moi a tendance à dire :
« Bande de connards, jsuis pas une machine ! Vous n’êtes pas à l’usine ! On n’appuie pas sur un bouton et hop ! Voilà un texte ! Et je ne suis pas une poule non plus ! Je n’ ponds pas des œufs gros calibre à la demande ! »

C’est là que je me rend compte que je suis loin de pouvoir pondre (justement, car au final, il s’agit un peu de ça qu’on parle, de mettre bas, de mettre au monde, d’accoucher, un texte.) aussi facilement que je l aimerais. (Oui, parce qu’avant toute chose, moi aussi, j’aimerais pondre, à nouveau.)
Je suis loin d’avoir tout compris à ce rôle de l’écrivain.
Je suis loin d’en être un.
Je n’ai pas confiance en moi, et j’ai peur d’en trouver définitivement l’inspiration.
Complexe, contradictoire.
Oui.
Mais une chose est sûre, c’est mon art à moi, c’est mon don.
Et j’en suis fière.
Et non je ne dirais pas non plus « écrivaine », c’est franchement pas joli, et à la lecture, et à la sonorité. (Et puis, la bataille des féministes c’était pour nos mères, moi je dis merci pour tout, maintenant je suis libre de choisir (d’ailleurs je choisis le Mâââââle) et à bientôt.)

Et finalement, à trente ans sonnera le Gong.
Je vieillirais bien.