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jeudi 24 juin 2010

Félix

Jeudi, 20h23, le téléphone sonne.
-« Hey Félix ! C’est le Jo ! »
-« Salut Jo, ça va ? Quoi de neuf ? »
-« La routine, mon vieux, la routine. Tu me rejoindrais pour un saint godet ? »
-« Ah ! Ah ! L’heure de l’apéro a sonné mon pote ! Au Rouge, ça ira ? »
-« Yep ! A tout de suite alors ! Je t’attends là bas ! »

Félix raccrocha, content comme à son habitude que l’on pense à lui à cette heure de la journée.
Il arriva au café Rouge. C’était une soirée chanson française, où un mec chantait les chansons d’un livret qu’il mettait à disposition des clients. A tour de rôle, plus ou moins, on choisissait sa chanson.
Ambiance conviviale.
Ambiance comptoir.
Ambiance nostalgie, aussi.

Jo était au bout du bar, devant une mauresque.
Le café était déjà noir de monde, la soirée s’annonçait alcoolisée.
Et Félix, ce soir là, avait renoncé, ou plutôt troqué l’écriture contre l’abreuvage.

02h12 du matin, les yeux pétillant de chansons françaises, de souvenirs et de bières, Félix salua la compagnie, et se pressa de rentrer.
En arrivant, il constata le bordel sur sa table de salon : Feuilles à rouler, cartons, miettes de tabac, verre vide, canettes de bière, stylo, capsules, cendrier plein, livre de Bukowski.

-« Chier…. », Marmonna t-il.

Lorsqu’il alla dans sa chambre pour se déshabiller et se mettre au lit, il cru entendre quelque chose venant du salon. Il s’arrêta une seconde, tendant l’oreille, puis repris finalement son déshabillage.
A nouveau.
Comme un vague marmonnement.
Félix fronça les sourcils.
Se demanda s’il avait vraiment trop bu une fois de plus, ou, si il avait bel et bien entendu une voix.

-« Putain !!! Tu réponds quand on te parle, FÉLIX !!! » Cria la voix.

« Merde ! » se dit Félix en sursautant. Les poils de ses bras hérissèrent.
-« Il y a quelqu’un dans mon appart, c’est pas vrai ! » dit-il tout en sortant de sa chambre.

Mais non, personne.
Rien dans le salon, ni ailleurs.
Félix légèrement angoissé, s’assit dans le canapé.
La voix reprit de plus belle :

-« Mais t’es vraiment con où tu le fais exprès ! »

Là, les yeux de Félix s’écarquillèrent.
-« Putain, j’y crois pas…le livre…, c est quand pas le livre qui…. »
-« Eh si, pauvre tâche ! C’est moi ! Les contes de la folie ordinaire, négligemment posé sur ta foutue table de salon ! »
-« Mais…Mais… » Balbutia Félix maintenant complètement halluciné.
-« Mais quoi ? Tu ne savais pas que les livres avaient le droit à la parole ? Eh oui mon vieux ! Je te parle. Je te parle parce que tu t’encroûte et que je suis là pour t’aider à te sortir les doigts du cul ! »
-« Non mais attendez, c’est quoi ce… »
-« Ah non hein ! Point de vouvoiement, on n’est pas chez le Pape ici !
Bon mon gros, tu fais quoi là ??Tu vas te remettre à écrire, tu vas lâcher un peu les bars, reprendre ton roman avant que tu ne le classe une énième fois inachevé, ou je dis à ton réveil de sonner parce que t’es sacrement à la bourre là ? »

Blanc.


E.E

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